Fiche de présentation

RAUSCHENBERG, Robert, ( Milton Rauschenberg, dit )

né le 22 octobre 1925 à Port Arthur, Texas, États-Unis d'Amérique d'une mère Cherokee ; 1943-1945, sert dans la marine ; 1946-1947, Kansas City Art Institute ; 1947, académie Julian, Paris ; 1949, Black Mountain College*, chez Albers*; 1949-1950, Art Student's League, New York ; 1952, vit à Rome avec Twombly* ; 1953, s'installe à New York ; 1964, y habite avec Jasper Johns* ; 1964, premier Américain à recevoir le grand prix de la biennale de Venise, qui devait être attribué à Bissière*, ce qui entérine le déplacement du centre de gravité de l'art de Paris à New York ; 1967, docteur honoris causa de l'université de Grinnell ; 1972, s'installe à Captiva, île du golfe de Floride ; 1976, docteur honoris causa de l'université de Tampa ; 1978, membre de l'académie des arts et sciences de Boston ; 1980, membre de l'académie royale de Suède ; 1984-1991, voyage à travers le monde pour défendre son projet OCI (Rauschenberg Overseas Culture Interchange) ou l'art au service des droits de l'homme ; 1984, docteur honoris causa de l'université de New York ; 1990, crée la Robert Rauschenberg Foundation, à New York, pour la recherche médicale, l'éducation, l'environnement, les sans-abri, la faim dans le monde et l'art ; 2000, élu membre de la Royal Academy, Londres ; 2003, victime d'une hémiplégie, continue à créer en fauteuil roulant, mais ne peut plus mettre au point manuellement son appareil photographique ; 2008, meurt le 12 mai en Floride.

Type(s) : Artiste

Technique(s) : Peintre - Photographe - Plasticien - Sculpteur

Présentation : De 1949 à 1954, il se cherche et fait montre d'intuitions créatrices qui, dans l'imaginaire, sont liées à des épigones auxquels elles sont erronément attribuées. Il montre des empreintes bleues de corps humain, grandeur nature, Blue Print, (1949, LFIK), que Klein* développe neuf ans plus tard ; des œuvres minimalistes* avant la lettre, soit toutes blanches - ce que reprendront, six ans plus tard, Manzoni* et, trente ans plus tard, Ryman* -, et d'autres toutes unies mates, sur lesquelles le reflet du spectateur devient motif, soit toutes noires, inspirées d'Albers*, soit encore toutes sombres, aux reflets cuivrés suivant le relief léger des journaux froissés recouverts de peinture, Should Love Come (1952, Bâ). Ce sont les White, Black and Red paintings. Il va jusqu'à créer en détruisant, c'est à dire en gommant un dessin de De Kooning*, Erased De Kooning Drawing, (1963).
Photographe, il dispose des corps de femmes sur du papier bleu sensible et, l'impressionnant par la lumière, il obtient un négatif grandeur nature, comme, par d'autres moyens, Yves Klein* en 1958.
De 1949 1951, il choisit, comme signe récurrent, le cercle flottant, que Gottlieb* adopte au tout début des années 1960.
Il réalise des peintures en noir et blanc, expressionnistes*, évoquant un monde végétal.
En 1952, à Rome, il photographie des objets triviaux que, deux ans plus tard, il incorpore à ses toiles.
La structure la plus générale de ses œuvres, collages, toiles, assemblages de menus objets en casiers, est rectiligne, s'opposant au débridé expressionniste.
Telle est, en 1953, l'empreinte de pneu sur rouleau de papier, qui inspire sans doute, en 1959, la ligne de Manzoni*. Une accumulation de papiers blancs dans un polyèdre de Plexiglas, en 1953, préfigure les Arman* de 1960.
Revenant à des œuvres à tendance monochromatique, feuilles d'or, asphalte, ou camaïeu de rouge feu, il incorpore à une de ces dernières une toile à matelas, Yoicks (1954, WB), et cela marque la transition vers la toile emblématique, Bed (1955, MoMA), lorsqu'il saute le pas.
Depuis 1954 et jusqu'en 1961, il innove avec ses Combine Paintings, assemblages hétéroclites de déchets, surlignés par de la peinture qui tiennent soit du tableau soit de l'installation*, Minutiae (1954) ou Monogram (1955, MMS), montrant un mouflon naturalisé sur un sol de peintures.
Comme il cherche à réagir contre l'abstraction* expressionniste, deux voies de retour à la réalité s'offrent à lui : soit la représentation, c'est le mode classique ; soit la présentation en reprenant l'inspiration prophétique de Schwitters*, et être à la société de consommation ce que celui-ci a été, en 1919, à la société de pénurie. C'est cette seconde voie qu'il choisit lorsqu'il décide d'élever le déchet au niveau des beaux-arts, en le faisant regarder, puisque c'est le regard qui donne l'existence à l'œuvre d'art. Cette démarche est plus celle du Junk art* que du pop* américain, et se trouve comme le reflet contrarié de l'optimisme de l'ère Kennedy.
Ses Combine Paintig, tableaux ou installations plus célèbres les uns que les autres, se trouvent dans tous les musées et sont les témoins de la surabondance des images que sa télévision, perpétuellement allumée, lui envoie ; tantôt une lampe clignote dans une cathédrale de rebuts de l'humanité, Charlème, Winter Cool (1954, SMA), ou (1959, Met), deux panneaux, avec application de métal en forme d'échelle entourés de débris de chemises de de mouchoirs ; tantôt c'est une literie complète, souillée, Bed (1955), déjà cité, qui fait allusion à l'expressionnisme abstrait par son drap, et anticipe le pop* par ses accessoires, tantôt les objets fétiches sont un abat-jour et un pneu reliés par des restes de tissus goudronnés, First Landing Jump (1961, MoMA) ; souvent sont incorporés des animaux empaillés, des gallinacées de  préférence, Satellite (1955, WM).
En 1961, il revient aux œuvres "planes" qui affirment pour la contester, la mémoire du dérisoire.
Il applique un procédé, mis au point par Andy Warhol*, d'impression photographique de la toile, de manière à pouvoir y incorporer, non plus l'objet, mais sa représentation entourée de résidus, de morceaux de sérigraphies, de fragments de portraits ou de tableaux célèbres, barbouillés, brochés parfois d'un petit motif géométrique, Sans titre (1958, UBS) ou Almanac, Overdraw (1962, Tate, ou 1963, KZ), ou Express (1963, Th-B) ou  lithograpjie sérigrahiée, Pull, (1974) de la série des Hoarfrost
Simultanément de 1966 à 1968, il procède à de simples collages de photographies de magazines, découpées quadrangulairement et collées sans véritable recherche, et aussi à des installations* comme Oracle, (1962-1965, MNAM), cinq éléments de tôle devenus déchets, animés par l'eau, l'électronique, etc.
Dans les années 1960, il réalise des interventions* collectives.
Au début des années 1970, retour à plus de relief avec des matériaux bruts, cartons d'emballage, - qu'il présente aussi en lithograhie, Tampa n°3 (MACM) - et c'est AAPCO (1975, MAC), béton, vêtements, roues de bicyclette, etc. ; puis - au contraire - allègement avec les Glacier Hoarfrost Series (1974, 1975, MNAM), dans lesquelles la mousseline, la gaze, les tissus transparents sont prépondérants, Casino Rock Mexico (1985, SGB). Ce n'est que parenthèse et le recours aux objets enchâssés reprend.
Il produit des multiples, Sling lit (1984, MAMAC), vingt-cinq exemplaires à huit  variantes, accrochant deux feuilles de plastique sérigraphiées, devant un caisson lumineux et ajoutant ainsi la réalité au sentiment de superposition donné par ses sérigraphies de 1962.
La série Samarcande (1989, MAM) montre des patchworks à 50 exemplaires, chacun sérigraphié de manière unique.
La fin des années 1980 le voit persévérer dans les transferts d'images hétérogènes, dont les photos prises par lui lors de ses voyages, enrichis de coups de pinceaux lyriques, de chevaux ailés babyloniens encadrant symétriquement des photos retouchées dans Rodeo Olympics Glut (1988).
Depuis 1985, le support varie, plus de toile mais des feuilles de métal, bronze, laiton, cuivre, aluminium, rongées par l'acide, European Bourbon Lagoon (1988), Borealis (1990), ou peintes ou vernies toujours réfléchissantes, voire de plâtre.
L'usage du métal comme support donne à l'œuvre une tonalité particulière qu'il force encore en adoptant le noir pour la série Night Shade (1991) ; en revanche, les fresques sur plâtre sont plus heureuses, Arcadian Retreats (1996).
Il sculpte par assemblage de matériaux sélectionnés, Non Negotiable Glut (1992), plaque à laquelle pend un sac de voyage en vinyle, ou Roar Pink Christmas Glut (1993), sorte de coq dont la queue est faite d'antennes de télévision et la tête, d'un épais ressort ; il se sert aussi du cristal ou du verre soufflé pour créer des pneus ou un balai (1995-1997).
Synapsis Shuffle (1999, WM) est composé de 52 panneaux de stratifié dont le contenu est repris au langage de l'artiste-chiffonnier, transfert d'images et apport d'acrylique ; ils fonctionnent comme un jeu de cartes : ils ont la même hauteur mais sont de largeur différente et peuvent être assemblés comme bon semble au décideur, à condition qu'il utilise au minimum 3 pièces et au maximum 7, hasard et collaboration.
Pour toutes ses réalisations, il dispose de 9 assistants.
Dans les années 1960, il est décorateur de théâtre et réalise des interventions* collectives.

Expositions : 1950, Betty Parsons, New York (G) et 1951 (P) ; 1959, Biennale de Paris ; 1961, Daniel Cordier, Paris, (P) ; 1964, Biennale de Venise ; 1965, Daniel Templon, Paris (P) ; 2002, Fondation Dina Vierny, Paris, (P) ; 2006, centre Georges-Pompidou, Paris (P).

Rétrospective : 1963, Musée juif, New York ; 1968, Stedelijk Museum, Amsterdam ; Kölnischer Kunstverein, Cologne ; Musée d'Art moderne de la ville, Paris ; 1977, musée d'Art moderne de New York ; 1992, Museum of Contemporary Art, Chicago ; 1997, Guggenheim, New York, en trois endroits ; 2005, Musée d'art moderne et d'art contemporain, Nice.

Citation(s) : Il a dit :
- Mes toiles sont une invitation à regarder ailleurs. J'ai toujours eu une volonté d'inclusion et non d'exclusion. (I can't imagine living without confusion).
On a dit :
- Quand il peignait, il était capable de faire croire à un univers de possibilités infinies. On avait l'impression que n'importe quoi pourrait arriver sur la surface. (John Cage)
- Le peintre le plus intelligent de New York. (Marcel Duchamp)
- Tout est politique. En politique, lorsqu'on veut se faire élire, rien n'est simple.  Il y a des courants, des sous-courants, des manipulations ; les prix à la Biennale obéissent aux mêmes lois que celles qui régissent une élection politique. (Leo Castelli*)

Divers : Canyon, (1959) qui lui vaut le le Grand prix de la Biennale de Venise, appartenant à Ileana Sonnabend*, est immobilisé aux Etats Unis depuis 1981, aux termes d'une loi interdisant toute cession  d'un aigle, empaillé fût-il, ce qui est le cas de ce Combine Painting. Privé de valeur financière, les héritiers d'Ileana Sonnabend ne le déclarent pas dans  l'héritage ; le fisc estimant l'oeuvre à 65  millions de$, ,la taxe à 29 millions...