Fiche de présentation

GORKY, Arshile, ( Vosnadig Manoog Adoian, dit )

né le 15 avril 1904 à Khorkom, Van, Arménie turque ; 1908, son père fuit aux États-Unis pour échapper au service militaire ; 1918, mort de sa mère ; 1920, arrive aux États-Unis avec sa soeur ; 1920-1925, étudie le dessin à la School of Design de Rhode Island, Providence, et à la New School of Design de Boston ; 1923, s'installe à New York, y fréquente Grand Central School et adopte le pseudonyme d'Arshille - du nom royal arménien Archak - et Gorky, du russe, amer ; 1926-1931, enseigne à l'école de dessin de New York, puis à Grand Central School ; 1933, se lie avec De Kooning*, adhère à Abstraction-Création*; participe au Federal Art Projects*; 1940, donne des cours de camouflage*; 1941, rencontre Breton; 1945, s'installe à Sherman, Connecticut ; 1946, un incendie détruit vingt-sept de ses toiles, et nombre de ses dessins, son mariage se défait, sa femme Agnès devenant la maîtresse de Roberto Matta*; il est opéré d'un cancer ; 1948, le 26 juin, un accident de voiture lui brise la nuque et le bras droit ; le 21 juillet, il se pend non loin de son atelier après avoir donné, sans succès, de nombreux coups de téléphone à des amis pour qu'ils viennent lui parler.

Type(s) : Artiste

Technique(s) : Peintre

Présentation : L'influence de Picasso* est éclatante chez le débutant, encore que la proximité des datations pourrait rendre l'ère du temps responsable des convergences : dans Portrait de Vertoosh, (1922, HIR) ou dans Portrait de Vertoosh, (1933, FCG), le trait ingresque rappelle le Picasso de 1919 à 1923, comme les souplesses anthropomorphes Chambre de la création, (1931, FCG), celui de 1926. Il faudrait aussi rapprocher L'Artiste et sa mère, (1926-1936, WM) de Deux Hommes debout, (1938) de De Kooning ; dans les deux cas, les visages seuls sont achevés alors que le reste du tableau demeure à l'état de ce que les anciens eussent appelés une étude. Nature morte, (1929, FCG) affiche déjà un certain affaissement des formes qui le mène aux variations sur l'ovale ou l'hélice. Mais l'influence picassienne est aussi celle du cubisme* synthétique, revu et complété par l'influence de Miró*, perceptible dans l'arrondi, le saugrenu, la souplesse de la forme et l'appropriation de pièces biomorphes, Temps de la nuit, énigme et nostalgie, (1931-1934, DAM), des éléments de taureau, Study for Bull in the Sun, (1942, BEL). Dans Harmonie, (1931, FCG) et Quartet, (1932, FCG), il s'agit bien de natures mortes postcubistes, mais l'arrangement frontal des formes dépasse la volonté de représentation.
Il entre dans la non-figuration*; il apporte aux formes miresques son propre vocabulaire, le masque en forme de loup, ou la palette, ou le versoir de charrue arménienne : Les images à Xhorkom, (1936), à la pâte épaisse, aux formes serrées les unes contre les autres, aux couleurs franches. Combat énigmatique, (1937, MMF) ajoute aux loups un foisonnement de triangles. Avec Enfant de la nuit iduméenne, (1936, HIR), il commence à restituer un fond monochrome à la forme qui s'en détache, et Vase de fleurs, (1938, FCG) répond à Trois roses, (1934) figuratifs et picassiens.
Un autre retour à la figuration est provoqué par la commande de 10 panneaux muraux, Aviation, Évolution de formes sous des limitations aérodynamiques, (1936, Newark International Airport Art Collection, New York), dans lesquels il se rapproche des peintres de la réalité industrielle décantée que sont les tenants de l'Esprit nouveau*. L'influence de Léger* est, cette fois-ci, avouée; elle va s'accentuer dans Transport par air, mer et rail, (1937) et éclater enfin ans Étude murale pour un bâtiment de transports maritimes, (1938); on la retrouve dans Poudre d'étoiles, (1940, FCG). Cette année-là, il est définitivement lui-même et dix ans durant, il pratiquera ce surréalisme* auquel on l'identifie e qui le fera célébrer par Breton*. Dans la série Garden in Sochi, (1938-1943) - 8 versions, dont 1938-1941, MET et 1943, MOMA -, les formes turgescentes, devenues flottantes, se modifient en flammes et surtout se trouvent, pour la première fois, tracées par un graphisme fin, aigu, arachnéen, autonome des couleurs qu'elles contiennent, noir, blanc et primaires. Il y a quelque chose, en deux dimensions et non-figuratif*, des fils de fer des personnages de Calder*. Son monde savamment ouvré fourmille de micro-représentations : un pied, un pubis de femme, un phallus, des testicules, un miroir, un paravent, un as de carreau monté en croix, Il varie sa manière; tantôt elle est d'une informalité fluide, Chute d'eau, (1943, Tate), tantôt d'une mobilité aérienne, Le Jardin de l'exaucement du souhait, (1944, FCG) ou Table paysage, (1945, MNAM), tantôt d'un relâchement baveux dont use aussi De Kooning, Ante Meduse, (1947, FCG) ou Peinture, (1944, FCG), Comment le tablier brodé de ma mère se déploie dans une vie, (1944, SAM), One Year the Milkseed, (1944, NGA) ou Dernière peinture, (1948); dans ces cas, c'est la toile nue qui révèle la forme en vide, autour de laquelle la peinture s'étale ; la palette est souillée, l'huile appliquée à la va-comme-je-te-pousse avec de grandes traînées délavées, tantôt encore d'une non-figuration aux traits épais de crayon gras, frappant taches, géométries, formes de couleurs, série Camarades de jeunesse, (1942-1945, FCG). Il sait reprendre en main construction et pinceau qui se refusent alors tout laisser-aller, The Betrohall, (1947, Whit). Ses dessins préparatoires, indiquent comment il part de la réalité pour l'abstraire au point de ne plus la saisir, Danse des paupières, (1945, FCG) ou La Vallée des arméniens, (ca. 1945, FCG).
Last Painting, The Black Monk, (1948), son dernier tableau, noir et blanc. 

Expositions : 1930, Modern Art Museum, New York ; 1947, exposition internationale du surréalisme, Maeght, Paris ; 2007, Centre Pompidou, Paris et fondation Calouste Gulbelkian, Paris, (P).

Rétrospective : 1985, Centre culturel portugais, Paris ; 1991, Musée Cantini, Marseille ; 2010, Tate Modern, Londres.