Fiche de présentation

BAZAINE, Jean

né le 21 décembre 1904 à Paris, France, descendant du maréchal Bazaine ; 1922, sculpture aux Beaux-Arts de Paris chez Landowski* et à l'académie Julian ; 1921-1925, histoire de l'art, littérature et philosophie en Sorbonne ; 1924, se consacre à la peinture ; 1936, premier séjour à Saint-Guénolé, Bretagne, qu'il renouvelle presque chaque année ; 1939-1941, mobilisé, interrompt sa production ; 1945, un incendie détruit son atelier et presque toute sa production d'avant 1943 ; 1951, pratique l'art du vitrail, de la mosaïque et de la tapisserie ; 1964, grand prix national des arts ; 1977-1980, deux opérations de la cataracte l'amènent à ne se consacrer qu'à l'aquarelle ; 2001, meurt le 4 mars à Clamart.

Type(s) : Artiste

Technique(s) : Peintre

Présentation : En 1945, un incendie détruit son atelier et presque toute sa production d'avant 1943, "que je n'avais guère vendue. Dès l'origine connue, on sent que la lumière et l'espace - comme plus tard le vent - forment l'humus et l'environnement de cet organisateur du chaos. L'Enfant aux vitres, (1934, MNAM) marque la montée de l'abstraction*, tout comme Verrerie, (1937, MPSG), d'une géométrisation des reflets dans le cristal, des ombres colorées, Enfants dans la ville, (1945, musée contemporain, Dunkerque).
Partir du réel, le réduire à quelques-unes de ses lignes droites, le nourrir de couleurs, c'est La Messe de l'homme armé, (1944) et Les Plongeurs, (1946) ; ils sont proches du Lapicque* de la même époque ; on y voit un grillage bleu, irrégulier, ou un carroyage ondulant et le triomphe de la couleur, chaude ou plus rarement froide, qui par ses contrepoints marque a profondeur. Il aime une construction verticale en deux zones juxtaposées, Peintre et son modèle, (1944), Promeneuse, et Nu au jardin, (1945, KH), La Flamme et le plongeur, (1953, MoMA), la dualité du titre répondant u système binaire de la toile. Il est désormais non-figuratif. Le titre n'est là que pour indiquer l'instant de l'émotion qui a provoqué le tableau. Couple dans les bois, (1947) alterne les unités de peintures claires et sombres que sont les touches en petites géométries, pour rendre le scintillement de la lumière dans les sous-bois, comme le faisaient les peintres de Barbizon.
Il est paysagiste, l'une des figures marquantes de l'abstraction* impressionniste, reprenant ses inspirations à la nature y choisissant ses titres, usant de la couleur avec prodigalité, et refusant les noirs même quand on ne s'aperçoit pas d'emblée qu'ils ont été remplacés par des marrons sombres ou des bleus nuit, Lune et oiseau de nuit, (1947, KNWf) ou Paysage gelé, (1951), ou Le Matin dans les bois, (1954), de bord à bord de longues touches aux copuleurs de l'automne, presque cubistes. Au début des années 50 apparaît une première rupture : sa peinture n'est plus l'équivalent du travail d'un maître verrier, avec ses traits épais de plomb; ils se dissolvent, Paysage, (1950). Marée basse, (1955, MNAM), intermédiaire, proche du travail de Manessier* avec des grilles approximative, acérées. Désormais, c'est un travail de touches, de longueur moyenne, autonomes, croisées, Ondulations sur la mer, (1963, MNAM), serrées, denses, vibrantes comme un tourbillon. Dans La Terre et le ciel, (1950, FMSP), comme dans L'Hiver, (1951, SAM), le mouvement balayant apparaît, avec l'assouplissement du pinceau qui travaille avec la légèreté du plumeau.
Peut-être est-ce seulement en 1954, avec le voyage en Espagne, qu'intervient cette modification ; il en ramène une dérive des formes et l'usage de l'arrondi, Espagne II, (1954, SMA). Aussitôt, ce court moment centrifuge est repris en mains. Les formes s'amenuisent, se serrent, le tableau redevient plus dense, Hollande, (1956) ou Zeeland, (1957), disent le miroitement de l'eau avec un travail horizontal du pinceau, coupé de quelques diagonales, dans les teintes acides vertes et violacées; graphiquement, c'est proche des Nymphéas, de Le Moal*, L'Arbre au plongeur, (1962). Les formes continuent à se resserrer, Matin au jardin, (1964), triomphe du bleu et du rouge, ou Bourgeonner, (1969), incendie de savane dans les garances et orangés. Ici intervient la seconde rupture avec l'usage du blanc, " un blanc qui n'est pas absence mais présence ", dit-il. Elle dure jusqu'en 1992.
Ce blanc est l'équivalent du noir des années 40, il sépare les touches, les structure, mais les délite surtout, en les laissant flotter, tout en les privant de profondeur. Il permet l'envol diagonal de la forme devenue paquet de feuilles ou de plumes, frémissement engerbé, partant au gré du vent ou des embruns; ce sont des cirrus qui se trouvent balayés, réduits à quelques couleurs vives, avec, comme depuis les débuts, la dominante du rouge et du bleu, Combat d'ombre, (1974, MNAM), Plongée, (1984, MNAM). Le début des années 90 est marqué par une palette violacée. Au coeur de cette période, douze aquarelles, La Chambre de musique, (1977, FNAC), forment une suite de buissons ardents dans une explosion des rouges, après deux oeuvres asymptmatiques, coupées en leur milieu par une fracture, le " zip " de Barnett Newman*.
En 1993, il commence à découper et à coller des papiers, qu'il peint au préalable dans ses couleurs de prédilection, les rouges, les pourpres, les violets. Tantôt ils sont de formes nues sur le fond blanc, tantôt ils sont repris par des touffes de traits au crayon virevoltantes ou d'applications d'huiles blanches. En 1995, une parenthèse importante : il abandonne la couleur, qu'il reprend en 1998. Ses papiers découpés et collés sont alors graphités et il procède ainsi à son " oeuvre au noir ". Les papiers sont constellés de trous d'épingle qui indiquent les hésitations avant la position définitive qui justifie le collage. Sans doute a-t-il jamais été, depuis les années 30, aussi figuratif : une flamme s'élance, la tempête de sable ou la houle se lèvent, la lune éclaire la jetée. Il compense cette soudaine austérité par une approche plus suggestive.
Les titres de ses toiles se réfèrent souvent à des lieux bretons, comme Finistère, qui l'a inspiré sans doute, mais auxquels la toile ne renvoie pas nécessairement le spectateur.  

Expositions : 1930, Jeanne Castel, Paris, (G) ; 1932, Van Leer, Paris, (P) ; 1941, Jeunes peintres de tradition française, Braun, Paris ; 1991, 1998, Louis Carré, Paris.

Rétrospective : 1959, Kunsthalle de Berne ; Van Abbe Mseum Eindhoven ; Stedelijk Museum, Amsterdam ; 1963, Kestner-Gesellschaft, Hanovre, Kunsthaus, Zurich, Kunstnernes , Oslo; 1965, Musée national d'art moderne, Paris ; 1990, Grand Palais, Paris.

Lieux publics : 1941, église du plateau d'Assy, (Haute-Savoie ); 1951, mosaïque d la façade de l'église d'Audincourt (Doubs) ; 1955, vitraux du baptistère de l'église d'Audincourt, rotonde de verre déployant de larges plages jaune, orange, violet et gris, acheminant la lumière même par temps sombre ; vitraux de l'église de Villeparisis Seine-et-Marne) ; 1969, tapisserie pour l'église de Cran-Gevrier (Haute-Savoie) ; 1970, vitraux sur le thème des sept sacrements, pour l'église Saint-Séverin, Paris : du centre vers les périphéries, la couleur passe du bleu froid tourbillonnant à la chaleur es rouges, orangés et jaunes, en verticales; 1973, vitraux pour la chapelle de Penguilly, Côtes-d'Armor ; 1984-1988, vitraux de la cathédrale de Saint-Dié ; 1984-1990, tapisseries pour les Gobelins; 1985-1987, mosaïque pour le palais du Luxembourg, salle Clmenceau ; 1987, céramiques de la voûte de la station de métro Cluny, faite de tesselles de 100 couleurs différentes, avec deux trophées d'ailes en vol, l'un en camaïeu de pourpre, l'autre d'outremer, et 54 signatures d'hommes célèbres de 2 m chacune accompagnent, sur 30 m, deux oiseaux et deux flammes ; 1988-1989, Halmstad, musée, mosaïque ; 1990, vitrail, hôtel de ville de Clamart ; 1991, vitraux pour la façade de l'abbatiale de Hauterive, Suisse.

Citation(s) : Il a dit :
- L'art est un caractère essentiel de l'objet dévorant cet objet tout entier. On retrouve toujours ses racines. Je pense qu'il y a des pays avec peintres et des pays sans peintres. Voyez l'école française, ininterrompue depuis le moyen âge. Je pense que la peinture se nourrit d'espace et de lumière. Ainsi Paris, ce n'est pas forcément ce qui s'y passe qui compte, mais sa lumière, dont se nourrissent le peintres. Peindre, comme certains contemporains, un arbre en supprimant, par exemple, ses contours pour le rendre abstrait, je trouve cela faible. Ce qui m'intéresse, c'est de recréer, à partir du vécu, des espaces où l'on sente la présence de la réalité tout à fait autre que la réalité du monde extérieur.