Fiche de présentation

BARRÉ, Martin

né le 22 septembre 1924 à Nantes, Loire-Atlantique, France ; 1988, grand prix national de peinture ; 1993, meurt le 8 juillet à Paris d'un cancer.

Type(s) : Artiste

Technique(s) : Peintre

Présentation : De nombreux tableaux de ses débuts (1949-1954) ont été détruits par nécessité de récupérer la toile. Dans ceux qui demeurent, suffisamment nombreux pour étudier la genèse du style, de la figuration aux géométries emboîtées verticalement, prolongées par des traits-antennes en diagonale, centrées pour laisser la toile respirer, disposées en guêpière ou en escaliers asymétriques; semis de petits carrés et rectangles, solidement coutelés, occupant une partie seulement de l'espace blanc comme un fragment coloré en noir et en brun de plan cadastral, 100 x 81, (1956, MNAM), Composition, (1956, MBALi).
Sur la surface grège de la toile s'avance des quatre angles un flux blanc qui s'arrête pour laisser un carré irrégulier, 59120 x 110, (ca 1959, MCM). Un semis de taches occupe partiellement la toile blanche, éloge du vide, 60-T-32 (1960) ou 60-T-45, tetraptyque (1960, MNAM) ou encore Lysa II (1962, MNAM). Il est l'un des premiers à use de l'aérographe pour dessiner à l'acrylique sur cire, à être bombeur*. Sa longue traque de l'espace, toujours blanc, continue, indiquée dans chaque tableau. Après des lignes, des diagonales, des repères suggestifs, il en vient aux géométries marquées parle carré ou son segment. Il y a de la mathématique dans l'air, ou tout au moins son esprit, pour longuement mûrir ces savants équilibres et ces variations austères d'abstraction* géométrique.
De temps à autre, il revient à un essai plus baroque, mais ce ne sont qu'escapades, comme cet effet de papier déchiré (1959), ces hachures issues directement des tubes d'huile, ou cette ligne ondulante qui sépare le tableau d'un côté à un autre, 61-T-39, (1961, MBANa). Il y aura aussi, de 1963 à 1967, la réhabilitation d'un matériau trivial, la peinture à l'aérosol, pour montrer des zébrures, des flèches, un angle droit, carré dans carré, 65-S-3, (1965, FNAC). Seul compte le geste dont la trace est témoin, (1965, 1967, MNAM).
Le carré presque parfait reprend ses droits, 72-73-A-200 x 185, (1972-1973, MBANa). La surface est découpée en diagonales coupées à angles droits, l'un des carrés est zébré de gros traits gris ou beiges, parfois opposés à d'autres carrés, zébrés aussi, mais en " surexposition ", parfois entourés d'un carré vide ou inversement, n'usant de toute manière que du trait droit, 76-77-B-125 x 120, (1976-1977, MBALi).
En 1979 débute la série des trois parallèles de couleurs affirmées, tendues, interrompues dans leur cheminement orthogonal, marquées parfois de repères non poursuivis, 80 B 50 x 140, (1980, MNAM). Lignes d'épure, repentirs apparents, espaces vierges, gris se fondant dans les blancs, couches patiemment superposées, tout est mis en oeuvre pour favoriser l'alternance du vide et des signes, du silence et de la parole. De 1982à 1984, période de géométries aux couleurs fortes, tranchant sur la délicatesse du timbre général de l'oeuvre, 84-85-108-156A, (1984-1985, MAMAC), une double indentation orange et jaune sur fond blanc, marqués de balises pour mieux souligner le vide. Au milieu des années 80, il y a comme une inversion implicite dans son propos : ce n'est plus l'espace qui est indiqué dans son tableau, c'est l'ensemble des tableaux d'une série qui définit l'espace. Il faut tous les repères de la variation de la position des mêmes géométries pour lire comment il marque son terrain. C'est pourquoi, travaillant par séries, l'accrochage lui-même d'un ensemble est signifiant : des toiles à hauteur des yeux, d'autres très haut qui font lever le regard. Les triangles centraux ponctués de petits cercles, balises ou punaises, sur un blanc imperceptiblement cassé de gris, de jaune ou de rose, vont reculer jusqu'aux limites de la toile, repoussés dans les angles par une ébauche de carré, permettant à l'imagination de conclure, 6-87-120 x 120 G, (1986-1987, FNAC). Les carrés tronqués ou triangles écornés, soulignés d'une faible ligne grise pour en faire des trompe-l'oeil ou disposés en prédelles pour indiquer les différentes perspectives imaginables, apparaissent dans les séries de 1987 et au- delà; les carrés pleins, sans ablation, reviennent et indiquent de leurs teintes douces, pastellisées, le triomphe de l'espace, 92 B-124 x 128-A, (1992).
On estime, en 1989, sa production à cinq cents toiles.

Expositions : 1954, Salon des Réalités nouvelles, Paris ; 1955, La Roue, Paris, (P) ; 1993, Jeu de Paume, Paris, (P) ; 2005, Sutton Lane, Londres, (P) ; 2006,  2013, Nathalie Obadia, Paris, (P).

Rétrospective : 1989, Musées des Beaux-Arts de Nantes, de Tourcoing et de Nice.

Musées : Musée des Beaux-Arts, Nantes, 17 oeuvres, de 1956 à 1973 et de 1979-1980.

Citation(s) : Il a dit :
-On ne pouvait pas penser que là où il y avait ce qu'on appelait des vides (une impression de non travail), peut-être y avait-il eu beaucoup de choses que j'avais décidé de supprimer. [...] Mes intentions sont plus dynamiques que contemplatives. Je ne propose pa cet arrêt, ce blocage, comme c'est le cas dans l'attitude contemplative, et où la jouissance est enfermée sur elle-même. Je veux, bien au contraire, que ma peinture fasse sortir de lui-même celui qui la regarde ou celui qui vit avec elle, et l'incite à refaire le monde et d'abord l'espace lui-même où il vit.

Bibliographie(s) : 2014,Le droit moral  est détenu par la veuve, Michèle Batté qui et suit l'élaboration du Cattalogue raisonné par Ann Hindry et Yves-Alain Bois