Fiche de présentation

SOULAGES, Pierre

né le 24 décembre 1919 à Rodez, Aveyron, France ; 1938-1939, admis au concours d'entrée des Beaux-Arts de Paris et ne s'y inscrit pas à cause de son académisme ; 1940-1941, mobilisé aux armées ; 1942, Beaux-Arts, Montpellier ; 1942, travaille comme viticulteur ; 1946, s'installe à Courbevoie et devient peintre "professionnel" ; 1948, à Paris ; 1959,  à Sète ; 1992-1994, interrompt de peindre pour se consacrer aux vitraux de Conques.
localisaion , Musée Soulages, Rodez ou SP

Type(s) : Artiste

Technique(s) : Peintre

Présentation : En 1946, Peinture, des traits d'amande et d'orbe frappent des assemblages diagonales de poutres au-delà desquelles des géométries de tons sourds forment le fond selon l'artiste, il en aurait peint 300) ;  En 1950, le premier plan disparait, Peinture, (LMK), mais des trous de lumière apparaissent dans le "mur" du second plan. Ainsi, des petits papiers de 1947 aux immenses toiles de noir pur de 1979, il développe un style tragique de formes en poutres et de couleurs limitées au marron, au bleu d'encre et au noir qui le rend universellement connu dès la trentaine. Il se situe dans l'abstraction* lyrique expressionniste*, même s'il le récuse.
Avec Peinture 1948-1949, (MoMA), il est proche (mais antérieur de trois ans) de Kline* et contemporain des Élégies de Motherwell*. Il ne peint que sur des châssis dont la longueur est égale à la largeur multipliée par la racine de 2 ou de 5,5, formules déjà retenues par les Égyptiens. De 1947 à 1952, ce sont de larges bandes au brou de noix ou en goudron, grossissement d'écritures indéchiffrables, érection de cactus, déploiement de décamètres, entassement de poteaux. Peinture, (mai 1953, MAMStE), goudron sur verre, entasse horizontalement des poutres qui organisent l'espace en laissant deviner le fond. Peinture, (mai 1953, SGM), et le format s'agrandit. Peinture, (mars 1955, FME), des rectangles verticaux ordonnés sur différents plans marquent une stabilisation. Peinture 14 avril, 1956 (MNAM), gagne encore en dimensions, pour un faisceau horizontal de poutres avec, au loin, un rougeoiement. De cette année, une autre toile applique des rectangles noirs éraillés de blanc sur un fond beige-gris. Peinture 8 décembre 1959, (KNW), sème des sections noires sur fond noir avec quelques lais blancs.
Les grands gestes s'animent, jetés à la brosse large, rapide et généreuse dans des cascades de formes soucieuses de laisser apparaître, moins ou plus, l'arrière-plan blanc,  Peinture 19 juin 1963, (MNAM). Que la frontalité soit retenue, ou bien la recherche de la profondeur, il est toujours question de l'obscurité carcérale, avec un point de jour de lucarne, de grands mégalithes en contre-jour ou des barrières de l'infini électrisées par l'irrégularité des horizontales issues des verticales, comme des troncs défoliés, dans cinq toiles appartenant au Marciano Group de Los Angeles.  C'est la célébration des ténèbres d'un Vendredi saint spatial.
Ces mondes cèdent le pas, en 1979, à une couverture plus uniforme du support qui ne ménage que des angles, ou un rectangle, ou une bordure blancs, Peinture 19 juin 1979, (MAMStE). IBrève transition pour l'adoption définitive du monochrome noir uniformément brillant, qu'il pratique depuis en microsillons géants. Noir-lumière, a-t-on dit ; il lui préfère, Outre-noir. La couleur vibre par l'opposition de tracés lisses et de tracés striés de la griffure d'un pinceau aux poils géants qui cisèlent l'huile ; le jeu des reflets prend toute sa valeur à la lumière rasante, Peinture 29.6.79, (MNAM), Peinture avril 1985, (FRAC).
En 1987, il introduit du bleu marine ou du beige, rarement ; un tétraptyque, dont chaque panneau est posé sur le bord du précédent et dont la tranche est bleue, donne ce dernier reflet au noir, lorsqu'on se déplace, 30.11.88, (Val.). On pourrait opérer un rapprochement avec les travaux d'Ubac*. Lorsqu'il aboutit à Cinq panneaux, février-mars 1992, faits de stries uniformes et superposées, il cède à la décoration architecturale telle que des artisans, artistes dans l'âme, la pratique. Il mêle les "zones douces", monochromes lisses, aux "zones violentes", monochromes striés, dont le brillant est assuré par de la résine, Peinture, 293 x 324 (27 janvier 1996).  Et les deux monochromes sont de couleurs différentes. Le blanc se retrouve entre les larges bandes noires comme un effet de jalousie, Peinture, (1997-2002), et les stries prennent la diagonale de la pluie (1986-2008).  Un polyptyque donne au noir un reflet argenté et un plissé comme pourrait en avoir une pièce de tissu, (1990-1991). A compter de 2004, il abandonne l'huile pour l'acrylique ; sur sept colonnes juxtaposées, il y a des traces affirmées de gouge qui se relèvent légèrement sur la droite, Peinture, 324 x 181,19 février 2009.
A compter de 2003, il laisse réapparaître le blanc de la toile ou du papier en fentes ou seulement en fissures, exceptionnellement même, en carré comme une fenêtre que le vieillard toujours  vert ouvrirait  sur son au delà.
Il est aussi cartonnier, sculpteur, Brronze 1, (1975, SP)  graveur, Litho n° 24 B, (1969,,SP). et décorateur de théâtre.
Pour titre, depuis 1950, simplement la date où l'œuvre est exécutée afin de refuser toute association avec la réalité et de n'annoncer que la matérialité.
À la fin de 1995, l'œuvre compte 1 150 numéros, dont 150 dans les musées et 700 chez des particuliers.


Expositions : 1947, Salon des Surindépendants, Paris ; 1948, Exposition itinérante en Allemagne (G) ; 1949, Lydia Conti, Paris (P), et Betty Parsons, New York (G) ; 1952, biennale de Venise ; 1954, 1966, Kootz, New York, (P) ; 1955, Documenta, Cassel ;  1957, de Tokyo ; 2001, Moscou, itinérante ; 2002, Karsten Greve, Paris, (P) ; 1979, Centre Pompidou, Paris, (P) ; 2012, Musée des Beaux-arts, Lyon, (P) ; 2013, Villa Médicis, Rome.

Rétrospective : Très nombreuses depuis 1960-1961, Kestner-Gesellschaft, Hanovre, Folkwangmuseum, Essen, Gemeentemuseum, La Haye et Kunsthaus, Munich ; 1996, musée d'Art moderne de la ville, Paris, Montréal et Sao Paulo : 2009, Musée national d'art moderne, Paris.

Musées : Musée Fabre, Montpellier, 19 œuvres.Musée Soulages, Rodez, 540 oeuvres.
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Lieux publics : - 1988, deux tapisseries de la Savonnerie, ministère des Finances, Paris, aux reflets veloutés ;
- 1992-1994, vitraux dans l'abbaye Sainte-Foy de Conques, XIIe siècle, Aveyron, pour lesquels il invente un verre irrégulièrement translucide.

Citation(s) : Il a dit :
- Il faut vivre avec la peinture. Puisque tout est permis sur la toile, les décisions à prendre sont d'autant plus graves. La peinture n'est pas un moyen de communication. Je veux dire qu'elle ne transmet pas un sens mais qu'elle fait sens elle-même. [...] Le tableau considéré comme une chose et non comme un signe. Lorsque j'étais adolescent à Rodez [...] un jour j'ai remarqué sur le mur une tache noire avec ses dégoulinements, de la matière, de l'épaisseur; une belle tache que je contemplais souvent. Un après-midi, je regarde ma tache et je ne la vois plus. À la place il y avait un coq dressé sur ses ergots. Je me précipite dans la rue et je retrouve ma tache [...]. Alors j'ai compris que la tache et le coq n'étaient qu'un, que parfois, je pouvais voir un coq bien dessiné mais banal qui ne possédait pas le mystère de la tache. C'était mon premier contact avec l'abstraction. [...]. Je crois que l'abstraction*, parce qu'elle cache ce que l'on peut voir et peut révéler ce qu'on ne voit pas, peut susciter des émerveillements identiques à ceux de mon enfance.
- C'est en 1947 (en fait un an plus tôt, n.d.l.r.) que j'ai commencé à grouper les traces du pinceau, toujours larges, - ces lignes étant dès le début surfaces colorées - en un signe se livrant d'un seul coup, d'une manière abrupte.
- C’est ce que je trouve qui me renseigne sur ce que je cherche.
On a dit :
- Kline est un grand paysagiste américain. Soulages est un gentil pâtissier (Jim Dine).

Bibliographie(s) : Pierre Encrevé, Soulages, les Peintures, 1946-2006, Seuil, Paris, 2007.

Divers : Record 2013 pour un français vivant : Londres, Peinture , 21 novembre 1959, adjugée à l'équivalent de 5,100.000 euros.