Fiche de présentation

JAWLENSKY, Alexei von

né le 13 mars 1864 à Torschak, près de Moscou, Russie ; 1884, officier de la garde impériale, se fait muter à Saint-Pétersbourg pour suivre les cours des Beaux-Arts ; 1891-1920, vit avec Maria von Werefkin*; 1896, école d'art d'Anton Azbe, à Munich, où il rencontre Kandinsky*; 1907, séjourne à Paris et travaille chez Matisse*; 1909, participe au NKVM*; 1911, au Blaue Reiter*; 1914, abandonne tous ses tableaux et émigre à Saint-Prex, Suisse ; 1921, s'établit à Wiesbaden ; 1924, promu sur la côte Ouest des États-Unis par Emmy Scheyer*; 1929, gagné par la paralysie déformante, il peut cependant continuer à peindre à deux mains ; 1934, interdit d'exposition par les nazis ; 1938, cesse de peindre ; 1941, meurt le 15 mars à Wiesbaden.

Type(s) : Artiste

Technique(s) : Peintre

Présentation : Son oeuvre s'ouvre par un Pot de Jacinthes, (1902, SGLM), parfaitement académique, sous influence de Répine. La même année il est divisionniste*. Expressionniste*, Soir d'automne en Haute-Bavière, (1904), proche des fauves*, Garçon, (1905, Casa Ruska, Locarno), accompagnant, quelques années durant, l'oeuvre de Kandinsky+, de Fussen, (1905, SGLM) à Paysage à Murnau, (1909, SGLML) et à Maison dans les montagnes, (ca 1912, GTM); la figuration y est faite d'à-plats et de taches, des couleurs stridentes du Blaue Reiter, avec dégradés limités par des traits de couleur et disposés en fonction d'une harmonie structurelle plus que de la réalité, La Bosse, (1911), ou le terrifiant Autoportrait (1911, KBâ) De même, Nuit, (1916, KBâ) et Le Plus Fort de l'Hiver, (1916, ibid.), prolongations suisses d'un style quasiment abandonné. En revanche, ses portraits sont du graphisme de Toulouse-Lautrec, La Plume blanche, (1909, SS) et La Danseuse A. Sacharoff, (1909, SGLM), ou à la Matisse*, Nu I, (1909, LBM.). Sa Byzantine, (1913, MNAM), tranche par son camaïeu lilas. Ses paysages personnels sont réduits à quelques géométries expressives et dramatiques, Paysage de Murnau, (1909, SGLM), et ses rares natures mortes ont la découpe coloriée et ornementale de l'intimité, Nature morte à la couverture bariolée, (1910, ibid.). Dès la fin de la première décennie du XXe siècle, le visage le poursuit et il le poursuit, Dame devant un fond bleu, (1908, ÖB), Créole, (1913) ; du stylisé déjà, traité en gros plan frontal, de plus en plus simplifié, sans souci de ressemblance; sa pratique est soit violemment expressionniste, avec des yeux immenses, fixes, outrageusement fardés, comme Van Dongen* le fera de manière mondanisée, soit en recherchant les structure élémentaires dans un cubisme réduit à quelques lignes. Tête de jeune homme (1911, KBe), Reife (1912, SGLM), icône aux yeux lourds de kohl, Espagnole (1913, SGLM ), sombrement expressionniste, ou Grande Tête de femme, (1913, SMKM), Tête byzantine, (1913, MNAM,). Réfugié en Suisse, sans argent ni atelier, il peint de sa fenêtre les paysages qu'il voit. La réalité est présente, le glacis, mince, laisse apparaître le support de carton. Il commence le chemin de l'abstraction*.
S'il quitte quelque temps le visage, c'est pour entrer dans une non-figuration, qui va de 1914, Deuil, (ca 1914, LBM), à Mystère, (1921, Mus. de Wiesbaden). Des taches colorées, vivantes et joyeuses, oblongues et verticales, figuratives ou abstraites, Nuit de gel avec croissant de lune, (ca 1915) est directement issu de Chemin rouge (1914), quand on les confronte. Sinon, elles apparaissent comme des corolles de tulipes, dont Nay*, plus tard, donne l'équivalent en corolles de pivoines. Renouant avec sa passion munichoise, il commence la série des Têtes mystiques, (1917-1919), et celle de Faces du Seigneur, (1917-1923). Dans la première, l'ovale du visage est habité par une courbe matissienne* continue qui va du sourcil gauche et enchaîne sur le nez, par les amandes des yeux avec leur iris en tache ronde ou ovoïde, par la dissémination des touches de couleur, symétriques mais de teintes différentes, le vert s'opposant au rose, la lumière à l'ombre. Dans la seconde, le trait se radicalise, le nez est fait d'un L, la bouche d'un trait, les couleurs se dissolvent. Il y atteint le dépouillement archétypique des icônes, de la Sainte face de Véronique, (vera iconê), de l'Achéiropoïèe ("qui n'a pas été fait de main d'homme") du XIIe siècle à la galerie Tretiakov, Jugement du Messie, (1920, HLD). Le plus souvent, les yeux sont clos, une tache, reprise à la série des variations, se pose au centre du front comme le signe bouddhique de la sagesse, les cheveux, séparés, retombent en demi-cercles, avec parfois une allusion à la couronne d'épines, Silence, (1918, Sztu). Après un bref retour aux paysages nuagistes, en 1918 et 1919, il repart dans une nouvelle série de visages, appelée, cette fois, Têtes abstraites, (1918-1935). Ici encore, il s'agit de véritables variations avec parfois des charmes Art déco*, Méditation, (1918, SGLM), pour aboutir à une stylisation de plus en plus poussée, Tête III, (191, LBM.), et Symphonie en rose, (1929, SGF) : les yeux, la bouche, trois traits horizontaux et le nez , un trait vertical, cette orthogonalité soulignant le symbolisme de la croix, avec le long des arêtes les vibrations de couleurs douces ou fortes, étalées en dégradé, Méduse, (1923, MBALy), et Head Red Light, (1926, MASF), tout en camaïeu rouge, agencements de géométries. Il reprend une palette plus sombre, Vibrant nº 16 A, (1932, LBM). Le point culminant du dépouillement, ce sont les quelques traits des vingt-deux estampes de 1922; ici, on pense au mot de Jean-de-la-Croix, Nada, rien ou l'aboutissement de l'expérience mystique. Atteint de paralysie déformante, il tient désormais son pinceau à deux mains et le manie par un mouvement des épaules, sa palette s'assombrit, il atteint les limites de la non-figuration, c'est sa dernière série, Méditations, (1934-1937), Là où luit la lumière éternelle (1934, LBM) ou Méditation (1937, SGLM), sa gamme plus encoreque sa structure le rapproche de Rouault*. Il revient épisodiquement à des paysages, comme s'il se rappelait ceux tracés de sa fenêtre de Saint-Prex, En face de ma fenêtre, nº 3, (1936, LBM). Il reste néanmoins le peintre du "Visage promis" (Itzhak Goldberg). On estime son oeuvre à 10 000 numéros.

Expositions : 1903, Sécession de Munich ; 1905, Salon d'Automne, Paris.

Musées : Städtische Galerie im Lenbachhaus, Munich : oeuvres de toutes les périodes; Long Beach Museum, avec de très nombreux visages de 1915 à 1937, légués par le collectionneur Melton Wichner.