Fiche de présentation

CHAISSAC, Gaston

né le 10 mai 1910 à Avalon, Yonne, France ; apprenti marmiton, bourrelier, cordonnier, commis de quincaillerie, etc. ; 1926, accueilli par sa sœur à Villapourçon, s'initie à la théosophie ; 1929, premier séjour dans un institut parisien pour débilité ; 1937, trouve un logement dans l'immeuble où Otto Freundlich* et Jeanne Kosnick-Kloss*, ayant leur atelier, le font dessiner ; 1942, Gleizes* et Juliette Roche* prennent le relais ; 1942, arrête son métier de bourrelier pour se consacrer à la peinture ; 1943, s'établit en Vendée, à Boulogne, à Sainte-Florence-de-l'Oie où sa femme est institutrice ; 1964, meurt le 7 novembre à La Roche-sur-Yon, après 11 jours de paralysie et d'aphasie.

Type(s) : Artiste

Technique(s) : Collagiste - Peintre - Sculpteur

Présentation : De1936 à 1942, ses dessins au crayon de couleur, à la gouache, à la plume laissent déjà apparaître, lorsqu'ils figurent, le trait continu, replié sur lui-même et comme camouflés des yeux. À partir de là, il ne quitte plus guère la réalité. Les deux années qui viennent sont influencées par Picasso*.
Puis il s'en tient à la forme cellulaire, assemblée à ses voisines et proliférant rapidement jusqu'à constituer une forme en soi détachée du fond ou, plus rarement, à remplir tout le tableau.
Dans ces formes que l'on voit au microscope, ici grossies et stabilisées, apparaissent des traces humaines. Humanité telle que la voit l'enfance ou la schizophrénie, approche grossière et fruste, visages-masques asymétriques grotesques, présentés de face et sans relief pour permettre l'assemblage par emboîtement de ce que la cellule a déjà regroupé, yeux, nez, bouche, dents, chevelure, fuyant toute perspective.
Un Chaissac isolé se reconnaît ; cinquante Chaissac regroupés ajoutent à la composition singulière de bric et de broc une tonalité de fraîcheur : des têtes surgissent, ahuries et narquoises, de l'amas irrégulier, Composition à deux personnages (1949, Vd'A). Il s'est, notamment en 1950, éloigné de la figuration directement lisible, se contentant d'articuler les formes déchiquetées, comme découpées à la cisaille dans du fer-blanc, limitées par un trait noir qui caractérise sa peinture plane, tandis que ses objets, ses totems, ses bois, tous ces matériaux fantaisistes auxquels il  réussit à faire rendre ce qu'il a décidé, ne connaissent pas ses frontières arbitraires et explicites ; elles sont remplacées par la simple rencontre des couleurs différentes, un peu délavées.
Le dessin est déterminé, même lorsqu'il ondule en alternance avec des droites fermes, avec une inclination pour la structure verticale.
De 1942 à 1964, c'est plus la technique qui se modifie que le style. Après la gouache, il vient à l'huile, après l'huile, au Ripolin ; après la toile ou le carton, au papier kraft, aux papiers déchirés et collés, Sans titre (1963, MNAM) ou Visage rouge (1962, Sd'O) ; après la surface plane, aux objets de rebut - des tôles découpées et peintes de 1954 à 1962 ; des planches totémisées de 1956 à 1961, Portrait d'Iris Clert (1961, MNAM). Il pratique même l'automatisme* en exploitant les taches d'eau laissées par une serpillière jetée au sol.
Son œuvre, dite d'art brut*, a largement inspiré Dubuffet*. Le sculpteur proprement dit est plus rare, taillant des pierres dont il borde de noir les angles, Sans titre (1948), tressant des végétaux à la nègre, Tête archaïque (1947, commune de Blainville-Crevon), mettant en évidence un charbon de bois soclé, Dame noire (1948).
Il est aussi l'auteur de nombreux textes et de milliers de lettres poétiques.

Expositions : 1938, Gerbo, Paris, (P) ; 1953, Circle & Square, New York, (P) ; 1957, Chave, Vence, (G) ; 1960, 1963, Pagani, Milan (P) ; 1961, Iris Clert, Paris, (P).

Rétrospective : 1965, 1998, musée des Beaux-Arts, Nantes ; 1973, Musée national d'art moderne, Paris ;  Nantes ; 2000, Jeu de Paume, Paris ; 2009, musée de Grenoble.

Musées : Musée de l'Abbaye, Les Sables-d'Olonne, six œuvres importantes et nombreuses autres ; musée de l'Art brut, Lausanne.

Citation(s) :
Il a dit :
- Vous pourriez faire un rapprochement entre mes tableaux et la rusticité des paysans (qui défoncent les mots comme moi le dessin) qui est si expressive et savoureuse [...]. Au fond, en peinture, je parle patois. Je viens de peindre La Franc-maçonne, c'est un portrait composé d'un assemblage de département (que j'ai choisi avec mon pendule), si bien que la Côte-d'Or la chapeaute, le Gard et les Bouches-du-Rhône la juponnent, l'Ardèche et la Drôme sont sa jaquette, le département du Rhône son cou, les Hautes-Alpes sont censées figurer son bras, elle a un œil à l'endroit de Chalon-sur-Saône, un autre sur Le Creusot et à Dijon, j'ai mis l'ornement du chapeau. Il paraît qu'on jurerait que le dessin est de moi alors qu'il est de ces messieurs de la Convention. [...]
Aux dires de certains, Dubuffet m'aurait plagié, ce que j'estime faux. [...] Je poursuis deux buts très différents, donner à mes peintures naïves, dessins d'enfants, toujours plus de simplicité [...] Quant à mes dessins abstraits à la plume, je veux les pousser à un très haut degré de raffinement ; ils représentent mes pensées intimes, mes rêves, mes aspirations, mes déceptions. [...] Je baptisais mes bonshommes tout bonnement de peinture rustique moderne. Plus avisé, Dubuffet parla d'art brut*, le mot fit fortune et je restais chocolat.

- Je m'éloigne à grands pas de l'art brut que je ne peux tout de même pas renier car il m'a été publicitaire et m'a assuré des protections.